Re: Le spit ou le téléphérique du XXIème siècle
Publié par:
wahil (192.249.39.---)
Date: 27 juillet 2004 Ă 17h05
>Grimpeur novice et de niveau moyen, randonneur et amateur de la montagne depuis mon plus jeune âge; je ne peux que m'attrister des effets néfastes pour ne pas dire destructeurs de la foule et du tourisme de masse sur le caractère sauvage et naturel de nos vallées alpines comme pour d'autres vallées et destinations touristiques prisées (les stations de ski en sont une preuve criante).
C’est vrai, mais les effets « destructeurs » des remontées mécaniques et autres aménagements immobiliers et touristiques sont sans commune mesure avec ceux d’un spit de 4 cm2. Quant aux randonneurs, ils se cantonnent généralement sur des grandes classiques laissant de côté une majorité de sentiers ancestraux qui meurent petit à petit, faute de fréquentation.
>Le caractère croissant du nombre de ses adeptes l’escalade est en passe de devenir un sport anti-écologique.
Le nombre des grimpeurs en salle augmente, le nombre des grimpeurs en extérieur diminue, statistiques confirmées dans je ne sais plus quelle revue d’escalade. Et il suffit de se balader sur les falaises, notamment chablaisiennes, pour s’en convaincre. La majorité des grimpeurs de salle n’a jamais touché de cailloux et n’en a aucune envie !
>Il est exact que pour se former ne serait-ce qu'aux manoeuvres de sécurité nécéssaires, on doit faire appel à une personne compétentes (bien que certains ouvrages soient très complets) de manière à éprouver ses base théoriques sur le terrain. Cette forme d'apprentissage "guidé" par plus expérimenté que soi permet donc aussi une introduction au respect du milieu dans lequel on grimpe. Par exemple, laisser un site propre derrière soi (aussi élémentaire que cela puisse paraître...), ou ne pas grimper certaines période de nidifications, etc... Autant de règles qu'il est important de respecter en regard du milieu naturel.
Il faut cesser de penser que les grimpeurs sont des irresponsables sans éducation vis à vis de la nature. Tu parles d’un nombre croissant de grimpeurs et pourtant, regarde autour de toi, au pied des sites d’escalade fréquentés : c’est propre, pas de papiers et autres déchets. Et lorsqu’il y en a, ils ne restent pas longtemps, car la grande majorité se charge spontanément de faire le ménage.
>Mais qu'en est-il du spit alors? Dans cette question cruciale aujourd'hui qu'est la sauvegarde de l'environnement, que vient faire ici un trou dans le rocher flanqué d'une cheville à expansion de sorte que l'on soit sûr que si la montagne nous refuse un hypothétique droit d'accès à son sommet on puisse y retourner. Non seulement en étant certain de n'y point perdre mais de plus de permettre le passage de mille et mille autres personnes derrière soi; qui s'ils n'avaient vu ou su que d'autres s'étaient occupé de leur survie avant ça. Peut-on décemment parler de respect de la nature?
Sans spit, nombre de voies n’auraient jamais existé. C’est se tromper de croire que l’on peut passer partout avec trois clous et un jeu de coinceurs sinon à vouloir se limiter à grimper dans des zones à la structure la plus souvent sale et herbeuse (en tout cas dans ces Préalpes). Passage de mille et mille autres derrière soi : houps ! On ne doit pas grimper aux même endroits alors, parce qu’on est vraiment loin de ce compte. Il n’y a pas bien longtemps, l’éthique voulait que l’on plante le moins de spits possible pour que ce soit un max engagé. Une éthique surtout destinée à prouver que l’on était le plus fort ! Maintenant c’est vrai on protège mieux car, pourquoi le cacher, un des plaisirs de l’ouverture c’est que la voie soit parcourue par un grand nombre et non pas que des gens se fracassent dedans. Ceci dit, cela ne sous entend en rien qu’il faut spiter à tour de bras : il faut privilégier la qualité par rapport à la quantité et ainsi respecter, nous sommes d’accord, la nature et les générations à venir. Mais ne mélangeons pas tout : pour ce qui est de la très réelle et urgente nécessité de sauvegarder l’environnement, et sans vouloir d’aucune manière justifier certains réels abus d’équipement, je pense qu’il est aujourd’hui des combats autrement plus essentiels que celui du spit. En tout cas, je ne prends pas beaucoup de risques en pensant, que le « dé-spitage » de Butterfly n’était certainement pas motivé par de généreuses considérations écologiques.
>Le fait qu'un enjeu touristico-économique plane au dessus de ce débat n'aide pas à y voir clair. En effet l'augmentation de la fréquentation des voies d'escalade ne va pas sans son parrallèle de consommation dans la vallée. Et le fait de sécuriser de la sorte toute les voies possibles et imaginables par de l'équipement scellé dans la roche pourrait presque laisser à penser que c'est pour y permettre l'accès du plus grand nombre.
Bof, en tout cas pas pour le Chablais où historiquement les plans d’équipements industriels (FFME notamment) ont toujours été refusés par les grimpeurs locaux. S’il faut compter sur la grimpe pour développer le tourisme local, il y a du souci à se faire.
>La facilité et l'accès à tout son deux demandes très fortes aujourd'hui. Les réponses que l'on a apporté à ces faux besoins innombrables se sont tous révélés plus catastrophiques les uns que les autres (voyez le prôbleme inéluctable du traffic motorisé dans la vallé de Chamonix). L'équipement et réequipement de voies faciles ou pas avec ce type de points d'assurance devrait être réservé aux falaises écoles et rester le plus loin possible de tout terrain, non pas d'aventure comme d'aucuns se plaisent à appeler la nature dans sa plus belle expression : LA MONTAGNE.
Pourquoi ? Pour garder la montagne pour nous seuls ? Remarque, ce n’est pas loin d’être déjà le cas. Même dans les voies bien équipées de moyenne montagne les cordées ne se bousculent pas, même pendant la haute saison. Dans les voies en TA (une majorité en région Chablais), il n’y a jamais personne ou presque.
Sinon, petit aparté, les habitants de la vallée de Chamonix ne veulent plus des camions et à juste titre. Par contre, ils n’ont jamais prétendu ne plus vouloir du tourisme, même de masse…
>Le spit ou le téléphérique du XXIème siècle
Des voies difficiles avec des spits à 5/6 mètres ou plus, avec la baston entre les deux et dans des dalles où tu ne peux rien rajouter, j’appelle pas ça vraiment du téléphérique. Et justement, ce genre de voies, c’est la grande spécialité locale et de la Suisse voisine ! Quant aux voies faciles, elles sont généralement les moins protégées mais ce sont aussi les plus dangereuses en cas de chute alors qu’elles s’adressent aux grimpeurs les moins expérimentés. Dommage.